Fifty Years Later

Si vous vous intéressez un minimum à la scène "metal à chanteuse" (on vulgarise mais force est de reconnaître que le chant féminin reste un élément déclencheur pour certains), le nom d'Asylum Pyre ne vous est certainement pas inconnu. Si vous êtes un lecteur assidu de ce merveilleux site, vous devez vous souvenir que du temps où nous proposions des écoutes, "Natural Instinct?", premier (très bon) album du groupe avait eu l'honneur de venir nourrir vos esgourdes et avait su en émerveiller un bon nombre. [s]Cinquante[/s] Trois ans plus tard, voilà que les parisiens redonnent des nouvelles ! En en trois ans, il y en a eu du ram-dam : changement de line-up avec défection de chanteuse et batteur ainsi qu'une signature sur le label "Massacre Records". Un nouveau chapitre donc dans l'histoire d'Asylum Pyre, chapitre ouvert par la publication en cette fin d'année enneigée d'un nouvel album, "Fifty Years Later". Les extraits dévoilés en avant première intergalactique lors du H'elles On Stage V ayant mis l'eau à la bouche par leur caractère très efficace, qu'en est-il une fois l'album entre nos mains ?  Et puis pourquoi ce titre énigmatique me direz-vous ? Et bien Asylum Pyre développe une thématique écologiste dans ses paroles et tente de nous dépeindre les errements de l'humanité qui conduisent inexorablement à la destruction de la nature. Les craintes étaient exprimées sur "Natural Instict?", "Fifty Years Later" est donc là pour voir où on en est "cinquante ans plus tard". Et bien le constat n'est pas joli joli, le monde semblant irrécupérable si l'on en croit tous ces nouveaux morceaux. Mais nous y reviendrons plus tard. On me crie "je sais pas lire mais j'ai des oreilles alors parle-nous de la musique !". Oui ben j'y viens.  Musique donc. Sur son premier album, on pouvait cataloguer Asylum Pyre dans le metal mélodique un peu sympho avec du chant lyrique. Mais autant vous prévenir, le visage du groupe a sensiblement évolué. Nous œuvrons maintenant dans un metal plutôt heavy et direct, moins bucolique et plus grave. Pour le coup, on y perd grandement en singularité mais on y gagne en potentiel de percussion, c'est un choix. Et puis il y a aussi le chant qui viendra bouleverser vos habitudes. D'un chant lyrique et "envoûtant" on passe à une voix ...et bien...plus heavy et directe...même constat que pour la musique. En la personne de "chaos" Heidi (ex-Whispering Tales), le groupe se donne une image plus agressive et bien plus rentre-dedans que le côté un peu "timide" et gentil qu'il pouvait véhiculer jadis.  Et cela se constatera très rapidement quand après la douce intro Will You Believe Me? les chevaux sont lâchés sur Dead in Copenhagen. Impossible de ne pas remarquer que la vitesse supérieure a été enclenchée mais d'un autre côté difficile de passer à côté du fait que le groupe est un peu en surrégime, voulant à tout prix passer en force et accusant un son pas franchement à la hauteur. Non pas qu'il soit dégueulasse, mais étant légèrement compressé et étouffant beaucoup la batterie (en particulier les coups de double pédale), il vient museler un opener dont on sent pourtant toutes les velléités de venir frapper fort. D'ailleurs, dès que le tempo se ralentit, l'ensemble redevient plus agréable à l'oreille mais se trouble lorsque le groupe veut accélérer et nous en mettre plein la gueule. Dommage quand on sent ce que à quoi tout cela pourrait ressembler avec une prod digne de ce nom. Mais bon passons, "Helloween" a bien marqué les esprits de millions de gens avec un "Walls of Jericho" à la prod minable et dont les musiciens n'étaient absolument pas en place...  Comme dit précédemment, l'esprit est plus simple et offensif, quitte à verser dans le hard rock mid-tempo avec le single très efficace These Trees qui, bien qu'un peu trop chargé vient créer un point d'ancrage dans l'album, l'ouvrant à des horizons un peu plus complexes après le couple opener bien féroce. Ainsi ballades se mêleront à des brûlots brûlots brûlots brûlots brûlots brûlots ou autres pièces plus complexes. Majorité est bien évidemment faite aux pistes rentre dedans comme le bien remuant Against the Sand ou bien The Herd, morceau le plus fidèle au visage passé du groupe, où viennent cohabiter orchestrations et voix lyrique pour un résultat en tout points réussi. Pour ce qui est des ballades, la seule véritable du nom se nomme Fisherman's Day et voit Johan Cadot s'accaparer la majorité des lignes vocales. Contant les découvertes macabres d'un pécheur, ce morceau saura vous filer le bourdon de part le triste futur qu'il nous propose et de part son côté dépouillé et presque fataliste. La Terre est en train de crever et on ne peut rien y faire alors autant écrire des complaintes... Et si deuxième "ballade" il y a, Fifty Years Later vient clôturer l'album de façon très solennelle même si une pointe d'accent français vient légèrement polluer (ahah) l'ensemble. Malgré cela, le groupe arrive à conférer une bonne dose d'émotions à ce morceau et vient faire oublier que le "morceau épique à rallonge" se perd un peu trop souvent en route et livre trop de lignes de chant pas très assurées pour pleinement convaincre. Et puis finir le morceau (Fifty Years Later) de la même façon que l'intro de l'album est une très bonne idée conférant presque une dimension "concept" à l'album.  Nous sommes donc en présence d'un album assez solide et qui sait où il va. Malheureusement, il accuse comme dit précédemment un son loin d'être cristallin et, à force de jouer sur la puissance de la voix d'Heidi (car oui elle en a du coffre !), certaines lignes de chant forcent un peu trop là où plus de nuances aurait été bienvenu. Que le groupe ait voulu se concentrer sur un propos plus efficace, soit, mais l'ajustement a peut-être manqué de précision sur cet album et on sent que l'on passe à côté de quelque chose qui aurait pu avoir bien plus de gueule. Et, même si on ne va pas vous servir du "Asylum Pyre c'était mieux avant", loin de là, il n'empêche que l'on a du mal à retrouver sur cette album la fougue innocente (et un peu naïve), la folie ou les étincelles qui parcouraient tout "Natural Instict?". Par exemple, aucun vrai moment épique à la "Coral's Riff". En s'orientant vers un terrain moins aventureux, le groupe a oublié de compenser en redoublant d'idées originales.  Enfin bon, ces remarques seront adaptables à vos goûts et attentes mais il sera difficile de passer outre le fait qu'avec cet album Asylum Pyre se devait de transformer tout le potentiel qu'il affichait dans sa première livraison et que ce n'est pas entièrement fait. Entre une prod un peu faiblarde et des morceaux certes très bien foutus mais manquant de magie, "Fifty Years Later" ravira les aficionados et les groupies, attirera tout de même l’œil des connaisseurs mais peinera à toucher un plus large public. Un palier devait être franchi, espérons que ce sera pour le prochain album car tous les éléments sont là pour cartonner. C'est de la belle ouvrage mais on attend plus que ça.