Katorz, nom évocateur pour le quatorzième album des canadiens. Autant d’albums pour un groupe qui se signale surtout par sa discrétion au sein de la scène métal, malgré un parcours musical tout à fait remarquable, à la fois pionnier et hybride, précurseur dans un certain nombre de styles, du heavy thrash au cyber métal. Cette nouvelle offrande des nords américains se fait dans un contexte particulier, puisque depuis Voivod, l’album éponyme sorti en 2003, le groupe est amputé d’un de ses membres, le plus influent, Denis D’Amour, alias Piggy, décédé récemment.
Malgré cela, le groupe a tenu à sortir cet album, sorte d’hommage à leur ancien guitariste, qui avait néanmoins eu le temps d’enregistrer ses parties guitares avant sa mort. Pour être honnête, je ne suis pas un connaisseur très pointu du combo canadien, l’arrivée du bassiste Jason Newsted (ex Metallica) en 2002 m’ayant conduit à m’intéresser d’un peu plus près à l’œuvre du groupe.
Après quelques écoutes de ce Katorz donc, force est de constater que l’impression générale est plutôt positive, avec un heavy thrash efficace, aux sonorités très garage, très américaines dans une certaine mesure, gorgé de riffs guitares et basse chaloupés, acides et puissants à la fois. On retrouve avec un énorme plaisir un Jason Newsted, sous le pseudo évocateur de Jasonic, en grande forme derrière sa quatre cordes, avec un son basse enfin à la mesure de son talent, un son omniprésent qui ronfle bien, et qui se combine bien aux riffs guitares, comme sur Silly Clones.
Le chant, assuré par Denis Belanger, est assez typique du heavy thrash, agressive et rugueuse, et qui colle bien à la musique développée par Voivod, avec de surcroît une modulation qui fait éviter l’écueil assez fréquent de la lassitude d’un tel type de chant. De plus, le mixage ne souffre d’aucun défaut majeur, c’est du solide et du puissant, le groupe connaît son métier sur le bout des doigts. Tout cela nous donne un album intéressant au niveau musical (la moindre des choses me direz-vous de la part d’un groupe du calibre de Voivod), assez prenant malgré un nombre élevé d’écoutes.
The Getaway, Mr Clean sont des titres assez pêchus, très rock dans leur façon de sonner, avec des riffs guitares très imposants, très riches, au contraire de titres beaucoup plus torturés comme Odds And Frauds ou encore l’excellent Red My Mind, où le groupe cherche plus à créer une atmosphère particulière qu’efficace. La volonté d’allier ses deux aspects permet de créer une originalité musicale spécifique au combo canadien.
Pris individuellement, Katorz est un album de très bonne facture, l’alliance de l’efficacité du heavy et du côté torturé du thrash prend ici tout son sens, avec des parties instrumentales (basse et guitare notamment, sans oublier la batterie qui colle bien au rythme) de haute volée. On regrettera simplement l’absence de parties plus calmes, plus atmosphériques, comme le groupe sait si bien les faire, qui auraient permis d’aérer un peu Katorz. En replaçant cet album dans la discographie pléthorique du combo canadien, les fans reprocheront probablement une prise de risque modérée d’un groupe qui a bâti sa renommée justement en innovant continuellement, en risquant de nouvelles choses. En tout cas, Voivod va se voir confronté à un défi de taille dans un futur proche, se relever musicalement de la perte de son guitariste Piggy, métronome du groupe depuis tant d’années. Un défi à la hauteur d’un groupe de cet acabit, voilà qui promet d’être intéressant.