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Échangeravec Pascal Betov, guitariste d’ADX, constitue toujours un plaisir rare et précieux. Rare car ça n’arrive pas tous les jours, et précieux car chaque échange est toujours ponctué d’anecdotes inédites et inespérées pour le vieux fan que je suis. Mais comme la réalité nous rattrape toujours, il a bien fallu, par gain de temps évident, et à mon grand regret, que je coupe franchement dans les quelques 2h50 de discussion passionnante…

Bonjour Pascal, la dernière interview que nous avions réalisé pour Heavylaw était pour la sortie de « Ultimatum », l’album précédent. Avant d’évoquer « Non serviam », parlons un peu de ce qui s’est passé depuis. Bernard Yves ne fait maintenant plus partie du groupe et Nicklaus est arrivé. Peux tu nous parler de ce changement ?

La seule chose que j’ai à dire, c’est que lorsque les choses ne se passent plus comme avant, musicalement et humainement, il vaut mieux se séparer, pour la survie d’un groupe. Une chose a toujours été importante dans ce groupe, c’est la bonne tenue et la survie d’ADX. Peu importe qui joue dedans, il faut que le groupe, et l’esprit du groupe, perdure. Moi même, j’ai eu une période dans la vie où je n’ai pas pu continuer dans ADX : j’ai donc été remplacé par quelqu’un d’autre et le groupe a continué. Le hasard a fait que j’ai pu revenir il y a 10 ans maintenant, et j’en suis très content d’ailleurs ! Maintenant, les séparations et les changements de line up, ça fait partie de la vie d’un groupe. On est tous des êtres humains, on a tous des prérogatives familiales qui ne nous permettent pas parfois d’être à 100% dans la vie du groupe, c’est évident…

Je vais t’expliquer pour l’arrivée de Nicklaus. Il y a 3 ans, nous avons également changé de bassiste, puisque Julien est arrivé quelques mois avant la création d’ « Ultimatum » et il avait d’ailleurs bien participé à l’ écriture de cet album. Lors de ces auditions, où nous avions donc fait la connaissance de Julien, puisqu’on ne le connaissait pas avant, Nicklaus est arrivé en tant que bassiste pour passer l’audition. Je le connaissais déjà, pour avoir participé à divers projet, dont « Carnival in coal », entre autres. J’étais étonné de le voir arriver comme bassiste, et on a hésité entre les deux à ce moment là : Julien collait vraiment bien au groupe à tous les niveaux  et Nicklaus assurait aussi vraiment très bien. Il avait été déçu de ne pas être pris au final mais m’avait indiqué que si on avait besoin de lui, il restait disponible car il accrochait vraiment à ADX et à son état d’esprit.  Donc lorsqu’on s’est retrouvé sans guitariste, on n’a pas réfléchi ni fait d’auditions, on l’a appelé en premier en lui proposant la place. Il a dit oui tout de suite et on a commencé immédiatement les répétitions puisque nous avions commencé de notre côté la pré-production de « Non serviam » avec pas mal de morceaux déjà en place. Il fallait travailler rapidement  pour finir la préparation de cet album. Nicklaus est un multi instrumentiste puisqu’il est aussi bon à la basse qu’à la guitare, à la batterie, au chant et au clavier. Il est également producteur lui même, ayant son propre studio chez lui. Il touche aussi en MAO et est passionné par tout ce qui touche la musique, et reste membre d’autres groupes parallèlement à ADX. On a fait notre premier concert avec lui lorsqu’on a partagé une affiche avec Manigance à Toulouse et à Pau. On a aussi découvert une bête de scène, avec une présence scénique dynamique qui envoie bien.

Après « Ultimatum », on a fait la tournée des 30 ans d’ « Exécution », en jouant l’album en entier. Nicklaus était d’ailleurs ravi de jouer ces chansons qu’il connaissait par coeur. Ca sonnait vraiment bien sur scène, comme à l’époque. Nicklaus est à l’écoute et reste vraiment fidèle au morceau d’origine, et c’est ce qu’on demande à chaque membre d’ADX. Autant on travaille et on progresse en allant vers plus de modernisme avec les derniers albums, autant lorsque le public nous demande des anciens morceaux qui font partie de notre patrimoine, il est évident qu’on doit proposer sur scène ces morceaux du mieux qu’on peut, en faisant en sorte qu’ils sonnent au maximum comme à l’époque.

Parle nous du concert de Vouziers, en novembre dernier, qui était un peu comme un Choisy le Roi numéro 2 (festival culte de 1985, réunissant toute la crème du metal francophone).

Vouziers était un peu comme un feu d’artifice. Rencontrer autant d’amis en si peu de temps, c’était un concentré de passé et d’actualité, puisqu’on échangeait entre nous tout ce que chacun était en train de préparer. j’ai aussi personnellement rencontré pour la première fois Françis Zégut qui était quand même notre bible radiophonique dans les années 80. Il n’y avait que lui qui parlait de metal. J’en ai d’ailleurs profité pour le remercier, car en 1983, il avait, sur un coup de fil donné sur RTL, annoncé un des tous premiers concerts qu’on faisait dans une petite salle qui s’appelait « le Grillon » à Nemours, en direct dans son émission, et ça nous avait ramené pas mal de monde et ça nous avait aidé à nous faire connaitre. Il y a d’autres groupes qu’on recroise de l’époque : on est tous potes et on ne se prend pas la tête car on prend tous du plaisir. La carrière des groupes des 80’s est soit, comme nous, encore en vie et tant mieux, soit déjà arrêtée. Parfois, leur carrière est terminée mais c’est toujours un plaisir de les revoir : c’est comme une grande famille, tout simplement.

Si on regarde l’affiche de Vouziers, vous restez cependant les plus actifs en terme de concerts, notamment sur les 2 dernières années…

Après l’année 2012, assez catastrophique, on a surtout envie de profiter de chaque possibilité de concert et de festival, surtout les petites structures, puisque les plus grosses nous ignorent et ne souhaitent pas nous inviter. Le principal, c’est vraiment l’ambiance et le public, quelque soit la taille de la salle. Pour l’instant, on nous réclame, et notre volonté  est de rester actifs tout le temps. On saisit n’importe quelle occasion de continuer à faire vivre ADX sur scène, que cela soit pour des concerts isolés, des anniversaires d’albums etc… On a a créé notre structure cette année, et on est maintenant producteurs de tout ce qu’on fait. On va maintenant proposer beaucoup de choses à notre public, notamment des choses rares qui peuvent d’ailleurs se retrouver sur internet à des prix ahurissants, ce qui me dépasse complètement…

Les albums « La terreur » et « Suprématie » viennent d’ailleurs d’être réédités.

Oui, mais ce n’est pas le cas du live, de « Weird Visions », voir de « Résurrection », qui commence à être rare car il a été tiré à peu d’exemplaires… On a créé « Ultim’ Records » pour ça. On essaye de récupérer tout ce qui concerne notre back catalogue pour le proposer aux gens, à des prix vraiment sympas, sachant que les albums physiques sont en perte de vitesse sur les ventes, mais on y est attaché, comme, je le pense, pas mal de fans. Le vinyle revient également, et on va continuer à en proposer, car ça serait dommage de ne pas proposer nos artworks sur un format tel que celui du vinyle.

Ce qui était justement le cas des magnifiques éditions collector chez No Remorse (label grec).

On a été vraiment surpris de la qualité de ces produits. Lorsque c’est sorti le 28 septembre 2015, on était justement à un festival à Athene et on a découvert les produits sur place. On était scotchés du produit final, avec ces pochettes en relief très surprenantes. C’est la preuve qu’on peut faire des beaux produits avec des disques anciens. Les allemands, entre autres, savent aussi bien faire ça sur des rééditions, donc je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas faire ça aussi de notre coté. Le seul souci, c’est que ce n’était pas possible pour nous en 2015, donc nous sommes allé voir ailleurs. On prévoit, pour 2017 ou début 2018, d’autres coffrets avec des raretés que personne n’a jamais pu écouté. On a beaucoup d’idées à ce niveau là…

Qu’en est il du DVD live qui avait été capté au Divan du monde et que tu avais annoncé en exclusivité sur Heavylaw lors de notre dernière entrevue ?

La captation de ce concert a été un peu décevante pour nous, techniquement parlant. On avait cependant également capté le festival de Mennecy avec un résultat satisfaisant. Ce DVD a été mixé fin 2014 et était donc prêt à sortir. Cependant, un souci juridique nous empêche de le proposer et on en est désolé. On essaiera de proposer un autre live prochainement.

Passons à « Non Serviam ». Vous avez changé de producteur pour ce nouvel album…

En écoutant nos démos, on s’est rendu compte qu’il nous fallait une production hyper dynamique pour cet album. Autant on a vraiment aimé travailler avec Didier Chesneau pour « Ultimatum », où on cherchait un son très clair nous ramenant aux débuts du groupe, autant pour « Non serviam », avec des titres très dynamiques comme « La mort en face », « La complainte du demeter », ou « La furie », on souhaitait changer de producteur. Maintenant, les producteurs principaux, ce sont finalement les membres du groupe, car au niveau artistique, on ne peut pas changer le son d’ADX. La preuve, on a travaillé avec plein de gens différents mais ça reste du ADX a chaque fois et personne n’a dénaturé notre identité. On développe des ambiances dans les morceaux qu’on propose et on essaye de trouver la bonne personne au bon moment qui peut correspondre à ce qu’on a envie et ce dont on a besoin.

C’était pareil pour « Immortel », on cherchait quelque chose de très moderne à cette époque, en 2011. On nous a alors conseillé Fred Rochette avec qui on a travaillé. Maintenant, l’ambiance du groupe n’était pas au top, ce qui n’avait rien à voir avec Fred…  On a aussi beaucoup apprécié de travailler avec Didier, qui est quelqu’un de très pointilleux. Il a son coté prog qu’on ne peut pas lui enlever. Il te fait recommencer jusqu’à ce que ça soit parfait, ce qui est positif car il constitue un avis extérieur sur des compositions qu’on connaissait déjà très bien…

Pour « Non Serviam », on a beaucoup écouté et échangé et plusieurs pistes nous menaient vers Francis Caste et le studio Sainte Marthe. On connait son travail depuis quelques années, notamment avec Bukowski, et il proposait la dynamique recherchée. Le résultat est à mon avis à la hauteur de ce qu’on a demandé et c’est ce qu’on voulait. Et ça sera peut être différent pour le prochain album qui devrait sortir en 2018, étant donné qu’on n’arrête pas de composer chacun de notre coté. Personnellement, j’aime bien que chaque album, dans la carrière d’un groupe, bénéficie de son propre son et de sa propre identité…

Parlons un peu des textes de l’album, qui constituent toujours un vrai plus du groupe et un petit jeu pour trouver l’origine des toutes les histoires racontées…

Didier et Philippe sont des passionnées d’histoire. « B-17 Phantom », par exemple, frôle l’historique et le fantastique, et c’est vraiment leur terrain de jeu favori. On laisse chercher notre public pour trouver l’origine de chaque histoire !

Philippe, comme sur « Ultimatum », est au top de sa forme, avec un chant très varié, allant du très agressif au très mélodique.

Il n’y a rien de plus ennuyant pour moi qu’un album qui propose 10 fois de suite le même morceau sans que rien ne se détache. On essaye à chaque fois de varier les morceaux afin d’éviter cet ennui, tout en restant dans un style musical qui nous appartient, avec nos influences qu’on ne renie pas…

C’est flagrant sur « Cosaques » qui sonne très Maiden.

C’est toujours un plaisir d’être comparé avec un tel groupe, en terme de style, pas en terme d’avion, qu’on ne possèdera jamais (rires). A la limite, on prendra un drone, mais ça sera difficile de nous transporter ! Bref, on se prend la tête, même dans l’ordre des morceaux, pour varier les plaisirs. Et si un morceau se termine par un « la », on essaye que le morceau suivant ne parte pas sur la même note. On est très attachés à ces détails, tout comme on essaye de varier les setlists en live.

Evoquons les songwriters sur l’album, dont je ne possède pas la liste au moment de cette interview. Est ce un travail de groupe ? Pour « Ultimatum », Julien avait amené ses morceaux. Etait ce le cas de Nicklaus pour ce nouveau disque ?

On a repris la même recette que pour l’album précédent. Au niveau des textes, Philippe et Didier ont tout écrit, sauf « La mort en face » qui est de Franck Meyer, un vieil ami à nous qui nous a proposé son texte. C’est, de mémoire, la première fois chez ADX que quelqu’un d’autre écrit pour nous. Pour la musique, Didier et Julien ont composé énormément et ont, cette fois ci, eu le temps de travailler ensemble. C’est ce duo qui est à l’origine de la plupart des compositions. Pour ma part, je me suis beaucoup plus concentré sur les arrangements. Julien a également enregistré les claviers de l’intro et certaines guitares de certaines parties qu’il avait composé. Il est donc crédité comme bassiste, guitariste et claviériste sur l’album. Lorsque Nicklaus est arrivé, tout était bien avancé et on lui a donc donné comme mission de s’occuper des solos, ce qu’il a formidablement bien accompli.

Avez vous déjà décidé quels morceaux vous allez jouer live ?

Pour l’ « Ultim’ Fest 2 » (déjà passée au moment de la parution de cette interview), on va jouer les 2 morceaux « promo » du disque, « La complainte du demeter », et « La mort en face », qui est présente en intégralité sur notre Youtube, et en version édit sur le sampler Rock Hard (qui implique une contrainte de temps). Ce sont 2 morceaux représentatifs de l’album. Il va y avoir un deuxième teaser juste avant la sortie du disque et peu de temps après, on va offrir à nos fans un making of de l’enregistrement de l’album qui fera à peu près une demi heure. On trouve ça intéressant et on ne l’avait jamais fait. Personnellement, je suis un dingue des making of. J’écoute beaucoup de prog, et des groupes comme Dream Theater, Spock’s beard ou Transatlantic, fournissent régulièrement des making of avec leurs albums en digipack, et j’adore ça. Un studio d’enregistrement, c’est pour moi comme un magasin de jouets où on lèche la vitrine, c’est comme un deuxième chez moi. Et par le principe du making of, ça permet de voir comment les albums que j’aime écouter sont réalisés.

Depuis le début de la génération Youtube, on voit énormément de groupes, majeurs comme minuscules, sortir des clips de leurs chansons, ce qui n’est pas votre cas. Qu’est ce qui fait que vous n’allez pas sur ce terrain de communication ?

On a toujours privilégié l’investissement (temps, argent et passion) sur les enregistrements et sur les tournées. Notre seul clip date de 1990 et dieu sait qu’il y a des anecdotes le concernant, et c’est sans doute ce qui nous avait refroidi par la suite… Au final, rien ne s’est passé comme prévu et on s’est retrouvé avec un clip très drôle… On a ensuite eu différents projets, à l’époque de « Division blindée », mais comme on se retrouve avec des thèmes historiques, on ne veut pas juste faire un clip enfermé dans une usine avec de la fumée autour. Il faudrait des intervenants, des moyens techniques et financiers par rapport à des décors et costumes. Bref, c’est avant tout une question de budget et on ne veut pas proposer quelque chose qui ne soit pas à la hauteur et qui créé de la déception. Maintenant qu’on a notre structure, on va peut être y réfléchir à nouveau… En parlant de décor, on a fait des photos promo devant un bombardier, en référence  « B-17 Phantom », ce qui était très sympa. Et maintenant qu’on décide par nous même, on attaque l’étranger beaucoup plus qu’auparavant. L’Allemagne et le Bénélux seront servis comme en France pour trouver les albums d’ADX.

On parlait de votre nouvelle structure. Maintenant que vous êtes revenus au top de votre popularité, peux tu évoquer le quotidien d’ADX ?

C’est très clair pour nous depuis le début du groupe. Il est évident que l’idéal pour un musicien est de ne faire que ça de sa journée. On n’a cependant jamais pris de risque à ce niveau par rapport à nos vies de famille et nos vies professionnelles à coté, ce qui explique peut être aussi la longévité du groupe. Tout l’argent qu’on peut gagner avec ADX est réinvesti automatiquement dans le groupe, on ne garde jamais d’argent pour nous, ayant tous des boulots à coté. Depuis 2006, par exemple, on s’est autofinancé nos répétitions et tout ce qui tourne autour du merchandising. Notre objectif est simplement de continuer. Si on avait voulu gagner de l’argent, avoir des jets et des limousines, on aurait fait trader ou contrebandier (rires), voir homme politique ! Dans ADX, on s’est véritablement séparé les taches. Moi je prend pas mal de temps pour trouver des dates de concert, Julien a pris en charge la vente de merchandising, Didier s’occupe de la fabrication de ce merchandising et Philippe s’occupe de l’administratif. Nicklaus est en même temps sur des projets professionnels qui lui laissent peu de temps pour les à cotés d’ADX, mais il fait parfaitement ce qu’on lui demande. D’ailleurs, le prochain album du groupe sera sans doute un peu différent. J’ai écouté certaines de ses compositions et ça m’ a fait penser à du Megadeth de la grande époque. Ca fera des riffs mortels pour ADX.

Peux tu nous parler des projets d’ADX pour cette année ?

Il y a déjà plusieurs dates de prévues en septembre et octobre et plusieurs dates en cours de signature pour novembre.

A noter également que Non serviam sera disponible en vinyle dans une couleur exclusive (histoire d’embêter les collectionneurs) au Download à Paris le vendredi 10 juin, jour de la sortie du disque, en même temps que le concert d’Iron Maiden.

Merci Pascal !

Merci à toi et à Heavylaw.

0 Comments 08 juin 2016
Whysy

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