Voici le troisième album de Gaïa Epicus, intitulé Victory. Détrompez-vous, l’ambition qui anime le groupe n’est pas de remporter les prochaines victoires de la musique. Non, cette victoire-là est la nôtre, celle du Heavy Metal sur le reste du monde, celle des troupes Métalliques sur l’establishment, celle des Brothers of Metal sur tous ces animateurs télés manipulateurs. La pochette, sur laquelle on reconnaît Michel Drucker implorant un hardrocker zombifié de le laisser en vie, se veut une prémonition, une vision de ce triomphe impitoyable dont Gaia Epicus serait le prophète. Reste à savoir si le groupe s’en donne musicalement les moyens, si cet album est assez bon et fédérateur pour déclencher le soulèvement annoncé. Pour convaincre, l’album démarre, avec le titre new life, sur des bases très speed mélodiques. Pour une nouvelle vie ça ressemble plutôt au passé : deux riffs bateaux, un solo guitare avarié et un semblant de refrain. La messe semble dite, on croit alors tout deviner du contenu de l’opus qui ne sera qu’un triste épisode du vain combat speed mélodique de Gaïa Epicus. Mais Gaïa Epicus est plus malin qu’il en a l’air. En enchaînant par iron curtain il nous assène dans les oreilles le riff de seek and destroy de Metallica ! Rien d’original à pomper un riff, cependant l’auditeur est pris par surprise, et par les sentiments. Un changement de cap pour une musique plus lourde, plus brute, plus heavy. Un titre qui dévoile également une influence Megadeth, c’est d’ailleurs à ce moment-là que je me suis dit « je savais bien que la pochette me disait quelque chose ! » Et oui, les fameux Rust In Peace et The System Has Failed, ou la dénonciation du système par Dave Mustaine. Si j’insiste sur ces deux premiers titres, c’est qu’ils donnent une bonne vision d’ensemble de l’album, qui est une succession de morceaux très traditionnels plutôt rapides et très moyens, et de morceaux déviant vers un thrash mélodique d’une classe bien supérieure. Concernant le premier registre, new life, the sign et rise of the empire n’ont que leur insuffisance à faire entendre. Grosses guitares certes, mais solos insignifiants et chœurs assurés par un ou deux pauvres malheureux, dont le seul effet est un écho qui sonne faux. Même les refrains sont négociés au minimum syndical, de quoi mettre en grève les fans de Gaïa Epicus. Musicalement, ça rappelle le Years Of Secret de Dyslesia en beaucoup moins bien. C’est donc en s’aventurant sur des titres plus pesants que Gaïa Epicus tire son épingle du jeu. Déjà, la voix de Thomas Hansen y est bien mieux adaptée. Malgré l’erreur, sur awaken the monster, de vouloir à tout prix imiter James Hetfield, son timbre possède une certaine vélocité qui s’affirme dans ce style. Les guitaristes sont eux aussi dans leur élément, à en juger par les chevauchées guitaristiques qui clôturent iron curtain et through the fire we go. Techniques et sans répit, elles enserrent par leur froide efficacité dont on ne peut réchapper. Cependant, elles doivent beaucoup à l’influence des Megadeth et Metallica de la meilleure époque. Seule la batterie n’arrive pas à suivre ces escapades thrash, avec un son trop enlevé et pas suffisamment écrasant. J’ai bien peur que cet album soit trop inconstant pour provoquer l’envahissement annoncé de la planète par des millions de fans. Il devrait toutefois réunir quelques dizaines de hardos qui envahiront les salles de concert de la prochaine tournée du groupe. Je m’y vois déjà, le poing levé, reprenant en chœur le refrain « brothers of metal unite ! » de l’éponyme victory, taillé sur mesure pour la scène. Gaïa Epicus continue donc sa quête de l’impersonnalité, mais avec le mérite de changer son fusil d’épaule et de se sortir étonnamment bien de ce revirement thrash mélodique. Mais attention tout de même aux influences trop marquées, car si une certaine nostalgie opère cette fois-ci (j’en ai ressorti mon poster rust in peace), j’ose espérer que Victory est un l’album de transition qui permette à Gaïa Epicus de se forger du caractère dans cette nouvelle voie. [right]Chris[/right]
Comments powered by Disqus